Joueb.com
Envie de créer un weblog ?
Soutenez le Secours populaire
ViaBloga
Le nec plus ultra pour créer un site web.
Débarrassez vous de cette publicité : participez ! :O)
 aloons 

Version  XML 
Session
Nom d'utilisateur
Mot de passe

Mot de passe oublié ?


2 - LA GREVE ET LA VICTIME

Le débat parlementaire sur le service minimum dans les transports publics, et ce qui en a été transmis par France Inter, me fournit la matière de la chronique d’aujourd’hui.

Dans la première livraison de la Chronique du Chien Assis, celle de ce vendredi 13 juillet 2007, je vous indiquais que nous allions traquer la confusion langagière et la polysémie dont les hérauts[1] modernes usent et abusent. Le difficile n’est pas de trouver un sujet dans l’actualité, mais beaucoup plus d’en choisir un parmi les possibles, tant cette détestable habitude de contraindre le sens empoisonne le temps de l’information.

Tout le monde sait que cette loi sur le service minimum dans les transports a pour objet de réglementer le droit de grève afin d’atténuer les inconvénients qui peuvent en découler. Tout va se passer comme si on disait aux salariés, « vous pouvez faire grève, mais à condition que cela ne gêne pas trop, et pas trop longtemps ». Je voudrais savoir qui connaît une grève efficace qui ne gêne pas trop et pas trop longtemps. A part celle des chirurgiens libéraux, qui obtinrent gain de cause en 48 heures, je ne vois pas. Ce ne sont pas les infirmières qui me démentiront, elles qui malgré plusieurs grèves, sur plusieurs années, n’ont pas obtenu grand-chose.

Hugues Portelli, sénateur UMP, invité du 7/9 de France Inter ce 17 juillet 2007, a déposé un amendement à la loi sur le service minimum dans les transports, tendant à permettre la réquisition de salariés grévistes, pour assurer un service complet aux heures de pointes. Pour justifier le dépôt de cet amendement, il a déclaré qu’en sa qualité d’utilisateur des transports en commun de la région parisienne, il avait été plusieurs fois victime de grèves. Je croyais que les victimes des grèves étaient les salariés qui pour faire valoir leur point de vue n’avaient d’autre moyen que d’arrêter de travailler, payant du prix des journées qu’ils perdaient, le droit d’attirer l’attention de la collectivité sur le conflit que la négociation n’a su, pu ou voulu éviter, lorsqu’elle a eu lieu.

Si j’osais je demanderais à monsieur Portelli combien de fois il a fait grève et pour quoi défendre. La même question étendue à tous les parlementaires donnerait certainement des informations intéressantes.

On assiste encore une fois à un renversement sémantique qui est le propre des grands communicants, des nouveaux hérauts. Nous avons déjà vécu de tels basculements de sens. Le dernier en date fut celui de l’immigration dont on nous infligea l’idée que c’était le pays de destination qui la subissait. Mais celui qui subit l’immigration, c’est bien celui qui, au risque de perdre sa vie, tente de quitter son pays dans un ultime réflexe de survie, pour lui et pour les siens !

Pour revenir à la grève, soyons sûrs que si l’opinion publique absorbe la potion du service minimum, l’encadrement du droit de grève, son amputation, sera étendue à tous les secteurs de la vie en société, tant il est vrai qu’en raison du nouveau concept de victime, celles-ci seront toujours plus nombreuses que les grévistes. Le patronat se chargera de l’expliquer.

A nouvelles victimes, nouvelle grève.

Le terme de grève, vient du nom de la place de la Grève. C’était une place de Paris, sur l’emplacement de laquelle se trouve aujourd’hui la place de l’Hôtel de Ville, dont la pente douce s’écoulait vers les berges de la Seine. Là se rassemblaient journaliers et brassiers en quête de travail. Ceux qui n’en obtenaient pas restaient sur la « grève ».

Encore quelque effort et les vagues de mécontentement viendront rouler jusqu’à en perdre leur force sur la grève. Et s’il advient que ces mécontentements soient source de tempête, la nouvelle grève la limitera à une semaine. Gros temps sur 7 jours, c’est soutenable.

Sous des airs de modernité nous revenons en arrière, voilà où nous conduit la confusion langagière savamment construite. D’aucuns diront que c’est habileté, je dis que c’est tromperie !


[1] Héraut : officier intermédiaire, dont la mission était de transmettre les messages, d’effectuer les proclamations solennelles et d’assurer l’ordonnance des cérémonies.

Ecrit par Gregorio, le Mercredi 18 Juillet 2007, 11:23 dans la rubrique "aloons".